Les 15, 16 et 17 mars 2013 s’est tenue à Tarragone (Espagne) une conférence ouvrière indépendante européenne,
réunissant 164 militants ouvriers, délégués de 13 pays européens et
issus d’horizons politiques ou syndicaux différents. Ce qui les a
réunis, c’est la nécessité de « débattre librement dans un objectif
unique : contribuer de façon coordonnée, dans chacun de nos pays, à
lever les obstacles qui se dressent contre la réalisation de l’unité.
Pour abroger les plans assassins de l’Union Européenne et ses traités !
Contre la dictature de la Troïka ! ». L’indépendance et l’unité du
mouvement ouvrier sont au centre des priorités à l’heure où, de Londres à
Lisbonne, de Madrid à Paris, Berlin, Athènes, les peuples font face à
la barbarie des institutions financières et européennes, appliquée par
les gouvernements. Voici le communiqué de presse publié à l’issue de
cette conférence.
Partout en Europe, la barbarie imposée aux peuples
La conférence a été l’occasion de dresser l’état des
lieu des différents pays et de mettre en évidence les mécanismes
communs à l’origine des mesures d’austérités. Partout en Europe, les
gouvernements aux ordres de la Troïka (UE – FMI – BCE) tentent
d’associer les organisations ouvrières au TSCG pour neutraliser la
résistance des peuples.
François Hollande vient d’essuyer un
lourd échec. Il avait fait de l’intégration des organisations
syndicales ouvrières au traités européens l’une de ses priorités. La CGT
et FO, deux des trois plus grandes confédérations, n’ont pourtant pas
ratifié l’Accord National Interprofessionnel (ANI). La combativité et
l’attachement des travailleurs à l’indépendance de leurs organisations
ont poussés leurs directions nationales à rejeter le « compromis historique »
voulu par Hollande. Les travailleurs ont raisons de rejeter l’acte III
de la décentralisation qui liquide le droit du travail et les
conventions collectives. Les enseignants ont raisons de rejeter la casse
de l’école publique et gratuite pour toutes et tous. Ils ont raisons,
ceux qui combattent contre le démantèlement de la sécurité sociale, la
privatisation des services publiques, la fermeture des services
hospitaliers et des bureaux de postes, de la suppression des allocations
familiales. Ces mesures, injonctions des institutions européennes et
financières relayées par nos gouvernements, vont à l’encontre des
intérêts du peuples. Les travailleurs sont nombreux à se mobiliser dans
les entreprises et les usines, mais la seule voie à même d’être efficace
est celle de l’organisation.
En Espagne, la précarité et le chômage touchent lourdement les jeunes. Luis Gonzalez, responsable syndicaliste CCOO, rapporte que « plus de 50% des jeunes sont au chômage » et que les mesures prises par le gouvernement espagnol aggravent la précarité, en ne proposant que « des
mini-jobs à l’espagnole : emplois à temps partiel, à mis temps, avec
des bonifications de 50%, voire 100%, sans versements à la Sécurité
sociale. Des emplois à 300 ou à 400 euros par mois. » La population
espagnole se dresse contre l’austérité qui touche les hôpitaux en
manque de moyens pour fonctionner, les salaires, les retraites, la
sécurité sociale. Mais elles doivent aussi faire face à l’immobilisme
des directions nationales des principales confédérations syndicales
engagées dans le « dialogue social », dont l’enjeu « n’est pas une discussion théorique, mais quelque chose d’éminemment pratique »
comme en témoigne les témoignages des délégués espagnols. Là aussi, les
gouvernements appliquent volontairement les directives européennes
contenues dans les traités de Maastricht, Lisbonne et le TSCG.
En Italie, l’instabilité politique du pays est
l’expression du rejet des plans de la Troïka (UE – FMI – BCE). Pourtant,
toutes les formations politiques participantes aux élections sont
d’accord pour appliquer la politique du TSCG. De la droite de Berlusconi au Parti Démocrate, et même le Mouvement 5 Etoiles « qui
dénonce le système et les partis mais qui, dans son programme, affirme
qu’il faut « réduire la dette », réaliser des coupes dans la fonction
publique et qu’il faut mettre en cause le Code du travail, avec la
« flexisécurité », ce qui est exactement le programme de l’Union
européenne ». (1) Se pose alors le problème auquel devront se
confronter ceux qui seront chargés d’appliquer les injonctions
européennes : « comment [les] appliquer face à la résistance et à la
mobilisation des travailleurs ? […] le rejet sur le plan électoral
reflète la volonté de résistance qui a vu les travailleurs se mobiliser
sans cesse pendant ces années : grèves, manifestations, occupations
dans tous les secteurs. » Cette résistance à poussé la secrétaire
nationale de la CGIL (la plus grande confédération syndicale d’Italie) à
ne pas signer le pacte proposé par le gouvernement Goldman Sachs ce qui
« constitue un point d’appui pour toute la classe ouvrière. »
Des délégués danois ont également
pris la parole lors de cette conférence. Ils ont fait état de la
combativité des travailleurs et du peuple danois contre les « restrictions
sévères aux dépenses sociales, aux dépenses pour l’éducation et la
santé, etc. Le plan liquide le droit à la libre négociation pour les
travailleurs et, de fait, instaure une véritable dictature sur le marché
du travail. » (2). 500 000 employés du secteur public ont
manifesté en soutien à la lutte menée par les enseignants contre les
coupes budgétaires. Per Sorensen, responsable syndical
dans le secteur de la construction, à pris la parole pour mettre en
évidence que quelque soit la couleur politique des gouvernements, ceux
ci appliquent les mêmes mesures dictées par l’Union européenne :
atteintes aux droits du chômage, privatisations des services publics,
démantèlement du Droit du travail. « Cela montre clairement que
l’Union européenne s’en prend à la politique sociale et à l’État
providence, de même qu’elle promeut une politique antisyndicale. […] Les
pays membres de l’Union européenne ont été vidés de toute démocratie et
l’Union européenne a instauré une sorte de « démocratie totalitaire » » (3).
Face à la barbarie, l’unité et l’indépendance
Ont également participé à la conférence des délégations allemandes, belges, grecques, hongroise, irlandaises, portugaises, roumaines, suédoises et suisses.
Toutes ont fait état de la situation des travailleurs et des peuples
dans leur pays, dont la détermination à ne renflouer les banques
inquiètent tant les responsables politiques et économiques. C’est en
effet pour y faire face que partout en Europe, les organisations
ouvrières sont attaquées et appeler à s’associer au TSCG. L’organisation
des travailleurs et des peuples a montré que c’était la seule voie
possible pour arracher des droits et des acquis afin de mener une vie
digne. Contre l’offensive des capitalistes et des spéculateurs, les
travailleurs montrent partout leur attachement à l’indépendance des
organisations et à l’unité. « A l’issue de la large et libre
discussion, nous sommes parvenus à une conclusion : une nouvelle étape
s’ouvre devant nous, celle de la préparation de la nécessaire et urgente
contre-offensive de la classe ouvrière et des peuples d’Europe » (4). L’association des organisations syndicales à l’application des engagements européens ouvre « la
voie à la précarisation du travail, à la destruction de
l’assurance-chômage et du droit à la retraite, permettant au capital
financier d’afficher, en Allemagne, des résultats insolents, et de
brandir ces « résultats » comme la solution devant être généralisée à
toute l’Europe, tout en camouflant les 8 millions de « bas salaires »,
les 11 millions de citoyens sous le seuil de pauvreté, les 25% d’emplois
précaires et l’explosion de la pauvreté qui frappe aujourd’hui la
classe ouvrière allemande, en premier lieu ses retraités ».
Si les peuples sont confrontés aux mêmes mesures
anti-ouvrières, c’est parce que nos gouvernements nationaux appliquent
volontairement les injonctions des institutions du système capitaliste :
renflouer les banques faillies, baisser le coût du travail (donc
démanteler le droit du travail et supprimer les cotisations sociales
pour les entreprises), privatiser les services publics. Partout, au nom
du remboursement de la dette et de la réduction des déficits publics,
les gouvernements mettent tout leur zèle à appliquer les mesures
contenues dans le TSCG. Dans ce contexte, « la seule voie pour
sauver la classe ouvrière et la jeunesse du désastre, le seul moyen pour
sauver les droits et les garanties arrachés par les femmes
travailleuses […] passe par le refus de tout pacte et de toute forme de
compromis historique. Un refus qui passe par le combat intransigeant
pour préserver l’indépendance du mouvement ouvrier et des organisations
qui le constituent ». La conférence à permit partager les points
d’appuis que sont les revers essuyés par les gouvernements dans les
différents pays, sous la pression des travailleurs et des militants.
Les délégués se sont engager à poursuivre, sur la
base des travaux de la Conférence et de manière coordonnée, le combat
pour l’unité et l’indépendance du mouvement ouvrier. Par delà les
frontières nationales et politiques, seule l’unité et l’indépendance
permettra de mener une contre-offensive urgente pour la sauvegarde des
peuples et des travailleurs. Un Comité de liaison européen d’action
commune est mis en place pour « développer le combat dans nos
organisations pour l’unité contre la politique du pacte, pour faire
reculer les différents gouvernements ». Les banquiers et les
spéculateurs sont extrêmement organisés. Ils sont pourtant peu nombreux.
Nous sommes le nombre, organisés, nous serons la force. Loin d’être un
replis identitaire et nationaliste, le combat pour l’abrogation des
traités européens est la première étape de la construction d’une « authentique union libre des peuples et des nations libres de toute l’Europe ».
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